Dimanche des Rameaux et des Manteaux
Par Gabriel REY

Le dimanche des Rameaux voit comme chaque année une foule inhabituelle venir à la messe. Les raisons sont diverses et propres à chacun. Mais de toutes ces années que nous avons passées dans l’Église catholique, de notre expérience, nous pouvons constater sans jugement de notre part que ce n’est pas seulement pour écouter le récit de la Passion de Notre Seigneur Jésus, mais pour avoir avant tout des branchages de rameaux bénis pour les déposer sur la tombe de nos ancêtres et de tous ceux qui ont été aimés. On gardera aussi des rameaux pour la maison, pour protéger ceux qui y habitent, même à côté d’une photo d’un proche éloigné ou disparu.
Les principales plantes utilisées sont du buis en Europe, mais aussi des branches d’olivier, de palmier, de saule pleureur et de laurier. Du saule marsault en Grande-Bretagne, des feuilles de Cycas revoluta aux Antilles et même des feuilles de cocotier au Vietnam.
LA PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS AU COEUR DE CE DIMANCHE
Le dimanche des Rameaux, nous écoutons où nous lisons ce que l’Église nomme « La Passion de notre Seigneur Jésus », qui ouvre la semaine sainte en nous menant jusqu’au dimanche suivant, celui de la résurrection de notre Seigneur Jésus. La Passion est précédée de la lecture de l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem où il est acclamé par le peuple. La Passion regroupe la préparation de la Pâque avec ses disciples, son arrestation avec la complicité de Judas Iscariote. Son procès très rapide devant les autorités religieuses et sa condamnation finale par l’autorité occupante : Rome.
UNE JOURNÉE D'HUMILIATION ET DE SOUFFRANCE
Notre Seigneur Jésus passera par le rejet, le supplice et l’humiliation de tous, Romains et Juifs, puis la crucifixion (supplice romain), sa mort et sa mise au tombeau.
Le dimanche des Rameaux pourrait aussi s’appeler : le dimanche des manteaux et des rameaux.
Avant le récit de la passion, nous lisons l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem.
Dans Matthieu 21, 8 :
« Le peuple, en foule, étendit ses vêtements sur la route ; certains coupaient des branches aux arbres et en jonchaient la route »
Nous remarquons bien que c’est bien d’abord avec des vêtements (des manteaux) que l’on jette pour acclamer Jésus.
Dans Marc aussi (11,8)
« Beaucoup de gens étendirent leurs manteaux sur la route et d’autres des feuillages qu’ils coupaient dans la campagne. »
Dans Luc 19, 36 ; il n’est pas question de rameaux :
« Et tandis qu’il avançait, les gens étendaient leurs manteaux sur le chemin. »
Et pas de manteaux chez Jean 12,13
« Les gens prirent des branches de palmiers et sortirent au-devant de lui. »
Oui et nous aimons cela, ce dimanche, il nous plait de le nommer « dimanche des manteaux et des rameaux »
Le peuple acclame Jésus en prenant des feuillages qui étaient à leur portée. Des feuillages verts. En Palestine, c’était une période de l’année où la végétation n’était pas encore totalement grillée.
Le peuple se dépouillait donc de leurs manteaux et de leurs vêtements. Tout était mis à terre pour rendre gloire. En Orient, c’est un symbole très fort. On se dépouille par humilité devant une personne que l’on admire, que l’on acclame ou que l’on veut protéger.
Oui, ce jour-là, nous acclamons Jésus. Nous le proclamons :
« Fils de David » ; « Celui qui vient au nom du Seigneur » ; « Le Roi, au nom du Seigneur »
Oui dans cette ouverture de la semaine sainte, nous catholiques execclesia, qui avons pris nos distances envers l’Église, retirés de nos communauté, nous pouvons aussi commémorer ce dimanche des manteaux et des rameaux.
Nous pouvons lire chez nous : Marc 11, 1-11 ou Matthieu 21, 1-11 ou Luc 19, 28-40
Nous pouvons méditer ces textes en pleine nature et de prendre des feuillages que nous avons à notre portée.
En esprit avec Notre Seigneur Jésus, nous pouvons méditer sur son entrée à Jérusalem. Et quelle signification portons-nous aujourd’hui en couvrant de gloire Jésus, en l’acclamant chaque jour de notre vie?
QU'EN EST-IL DU ROYAUME DE DIEU ?
Pendant sa mission sur terre, notre Seigneur Jésus n’a jamais voulu être proclamé Roi. Roi d’un pouvoir établi par les hommes sur cette terre. Non !
« Mon royaume n’est pas de ce monde (nous dit Jésus). Si mon royaume était de ce monde, mes gens auraient combattu pour que je ne sois pas livré aux Juifs. » Jean 18, 36
Et nous catholiques, retirés de nos communautés, nous accueillons Jésus aussi ce jour-là.
Ce dimanche des manteaux et des rameaux nous le vivons chez nous ou en pleine nature seuls ou en invitant notre conjoint et nos enfants. Mais ce dimanche est aussi nommé dimanche de la Passion.
Que veut dire exactement la Passion ? Cela vient du latin qui veut dire « Souffrir ». Comment peut-on passer d’une entrée en liesse, être acclamé en nous jetant des manteaux à terre, en secouant des rameaux comme des étendards avec des louanges et des chants et de subir quelques jours après un rejet, des humiliations et une mise à mort. C'est un renversement brutal. Un effondrement total. Sur son chemin de croix, Jésus s’effondrera à plusieurs reprises. Aucun manteau ne sera à terre pour amortir sa chute.
QUE S'EST-IL PASSÉ ?
Durant toute sa vie missionnaire, notre Seigneur Jésus a susciter des interrogations (Est-il le Messie tant attendu ?) et des méfiances. Les autorités religieuses ont essayé à plusieurs reprises de le piéger en se référant à la loi de Moïse. Au fil du temps, la colère et la haine ont provoqué une pulsion de mort.
Finalement on peut en déduire, qu’il est facile d’acclamer et de louer quelqu’un, aussi facile de le rejeter et de le détruire. Dans sa généralité, nous en avons hélas des témoignages, l’Église a rejeté des hommes et des femmes pour qui notre Seigneur est venu dans notre monde. C’est assez effrayant. La fraternité dans une communauté paroissiale n’existe pratiquement pas. Les églises sont vides. Le Temporel et le Spirituel se sont chamaillés le pouvoir. Et les petits trinquent !
Dans le cadre des abus sexuels, l’Église catholique s’est empêtrée dans les mensonges et les silences. Elle a permis de détruire des corps, des âmes, des vies… Elle aura peut-être du mal à s’en remettre.
UNE HISTOIRE D'AMOUR ENTRE JESUS ET JERUSALEM
N’oublions pas non plus que la Passion, c’est aussi une histoire d’amour entre Jésus et Jérusalem, entre Dieu et Jérusalem… La cité de David, son ancêtre, l’oint de Dieu où Salomon construira le premier temple pour l’installation de l’Arche d’Alliance.
De suite après sa naissance, Jésus fut présenté au Temple de Jérusalem acclamé par un juste nommé Syméon et par une prophétesse nommée Anne. À l’âge de douze ans, il fit l’admiration des maitres du temple et des docteurs de la loi. Une histoire d’amour, car il se sentait bien dans la maison de son Père… Étonné même que ses parents puissent le chercher ailleurs.
Au chapitre 2 de l’Évangile de Luc, aux versets 41 et suivants, il est dit que Jésus avait échappé à la vigilance de ses parents. Ils l’ont trouvé au bout d’une journée entière dans le temple. D’où la célèbre réplique de Jésus à ses parents au verset 49 :
« Pourquoi donc me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? »
Dans cet amour pour Jérusalem, le premier verset du repas pascal de Jésus, l’évangéliste Jean nous dit et tout à un sens, Jn 13, 1 :
« Jésus, sachant que son heure était venue, de passer de ce monde au Père, lui, qui avait aimé les siens qui sont dans le monde, il les aima jusqu’à la l’extrême ».
Quand Jésus pleure sur Jérusalem (Luc 19, 41-44), c’est avant tout un déchirement d’amour.
L'AMOUR A EU LE DESSUS SUR LA MORT
Cette histoire d’amour finira très mal. Le peuple le mettra à mort et presque tous ses disciples paniqueront et prendront la fuite. Après son arrestation, Jésus ne se défendra pas. Il ne manifestera plus une seule colère. Il ordonnera même à Pierre qui avait sorti son glaive (épée) pour le défendre au moment de son arrestation, celui-ci en a même tranché l’oreille du serviteur du grand-prêtre, notre Seigneur Jésus dit à Pierre :
« Remets ton épée à sa place, car tous ceux qui prennent l’épée, périront pas l’épée. » Matthieu 26, 52
Jésus a laissé Jérusalem l’envoyer à la mort par amour… pour tous… de Jérusalem aux extrémités de la terre.
Après avoir connu toutes les souffrances inimaginables, il eut encore la force de penser à pardonner :
« Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » Luc 23,34.
L’amour a eu le dessus sur le mort.
Méditons sur ce dimanche des manteaux, des rameaux et de la Passion. Regardons-nous, regardons autour de nous tous ces hommes et ces femmes qui se déclarent, qui proclament leur amitié et leur amour. Ils se dépouillent les uns pour les autres et se déchirent et se détestent au bout d’un certain temps.
L’amour du Christ, lui, n’a jamais défailli. AMEN